Réunion d’extrémistes interdite

La Liberté: Le Conseil d’Etat a estimé qu’il existait un risque pour le maintien de l’ordre public

Conférence nationaliste L La «conférence sur le nationalisme» prévue ce samedi 5 novembre dans la région lausannoise est interdite. Le Conseil d’Etat vaudois en a décidé ainsi lors de sa séance hebdomadaire d’hier, invoquant des risques pour l’ordre public. Fait plutôt rare, le gouvernement a pris cette mesure en application de la clause générale de police, valable sur l’ensemble du territoire cantonal. «Elle restera applicable si la date précitée est différée», précise-t-il dans un communiqué.

L’annonce de cette conférence avait été révélée par la presse alémanique vendredi ­dernier, quelques semaines à peine après qu’un concert néonazi a réuni 5000 personnes à Unterwasser, suivi par un autre événement à Kaltbrunn, tous deux dans le canton de Saint-Gall. Les deux manifestations ont provoqué une avalanche de réactions, notamment dans le monde politique.

Lieu tenu secret

La manifestation vaudoise devait réunir trois orateurs d’extrême droite, dans un lieu secret: Philippe Brennenstuhl, à la tête de la section romande du Parti nationaliste suisse (PNOS), Daniel Conversano, fervent défenseur d’une Europe blanche, et Sébastien de Boëldieu, membre de l’organisation néofasciste italienne CasaPound. Le tout suivi par un concert acoustique du groupe lyonnais Frakass, habitué des références au nazisme.

Le lieu où devait se tenir ce rassemblement reste un mystère. Muettes, les autorités refusent même de dire si elles l’ont identifié, pour des motifs de sécurité. Dans le cas où la conférence serait maintenue malgré l’interdiction, «la police cantonale prévoit un dispositif pour faire respecter la décision du Conseil d’Etat», indique Laurence Jobin, porte-parole du Département des institutions et de la sécurité.

Le gouvernement a fait une pesée d’intérêts, entre le droit à liberté d’expression et les risques de débordements. «Vu la nature de la conférence et les appels à contre-manifester lancés ces derniers jours, le Conseil d’Etat a estimé qu’il y avait une menace pour l’ordre public», ajoute la déléguée à l’information.

Hier, la gauche vaudoise a lancé un appel pour donner de la voix contre ces mouvements «fascistes». Le texte, signé par une centaine de personnalités vaudoises, dont de nombreux élus cantonaux et communaux, est notamment soutenu par le PS, les Verts, le POP et solidaritéS, ainsi que plusieurs organisations et associations. Un rassemblement était prévu samedi à Lausanne, qui sera du coup probablement annulé.

«Le fascisme n’est pas un courant politique comme un autre et ne doit pas être traité comme tel, souligne l’appel. Les groupes fascistes promeuvent ouvertement une idéologie raciste, sexiste, homophobe et défendent l’avènement d’un ordre autoritaire. Ils cherchent aujourd’hui à normaliser leur existence et à se doter d’un vernis de respectabilité à travers ces conférences.»

Satisfaction à gauche

Nicolas Rochat Fernandez (ps), signataire de l’appel, estime que le Conseil d’Etat a pris la bonne décision. «Il y a une limite à la liberté d’expression à partir du moment où l’on porte atteinte aux libertés fondamentales en promouvant des thèses telles que celles du PNOS.»

Jean-Michel Dolivo, dont le parti solidaritéS a lancé l’appel des forces de gauche, ne s’en plaint pas non plus. Il nuance toutefois: «Une interdiction ne va pas régler le problème de fond. Ce qui est important, c’est de combattre et de dénoncer en permanence ces idées fascistes et racistes qui essaiment en Suisse et en Europe, tout comme les mouvements qui en font la propagande.» ·