Des antifascistes protestent à Genève

Le Matin Dimanche: Manifestation Le mouvement d’extrême gauche SolidaritéS organisait un rassemblement hier à Genève contre la venue de l’idéologue Alain Soral, qui devait tenir conférence. Craignant des affrontements entre partisans de droite et de gauche, aucune salle n’a accepté sa venue.

Ils étaient plus d’une centaine sur la place des Grottes, près de la gare Cornavin, à Genève. Manifestants de gauche et d’extrême gauche étaient là pour signifier leur colère contre la venue dans la Cité de Calvin de l’idéologue Alain Soral, condamné à plusieurs reprises pour propos antisémites et injures raciales. Il devait y tenir une conférence en compagnie du Cheikh Imran Hosein, philosophe musulman dénonçant «un complot mondial judéo-chrétien».

Qualifiée de fasciste par ses opposants, ladite conférence n’a finalement pas trouvé de lieu d’hébergement, ce qui n’a pas empêché SolidaritéS – mouvement «anticapitaliste, féministe et écologiste pour le socialisme du XXIe siècle» – de maintenir sa manifestation. De la provocation? «Absolument pas, rétorque Jean Burgermeister, membre de SolidaritéS. Nous ne pouvons plus laisser cette idéologie fasciste nauséabonde s’exprimer. Se réunir aujourd’hui, c’est dénoncer l’extrême droite et ses dérives, par opposition à un système politique qui se tait en attendant que la tempête passe.»

Dans les discours, les intervenants ont parlé, pêle-mêle, de racisme, de sexisme, d’homophobie, des élections américaines, de la condition des salariés, d’un système politique indigne de confiance ou encore du conflit syrien. Alain Soral ne semblait finalement être qu’un prétexte. L’idéologue a toutefois été visé directement par une banderole brandie par trois hommes encagoulés, sur laquelle on pouvait lire: «Crève raclure, Genève reste antifasciste». Une démonstration extrême peu appréciée par une large majorité des personnes présentes, qui ont regretté cette forme de communication déplacée dans une manifestation pacifique.

Ce genre de dérapage ou d’autres plus physiques, c’est sans doute ce que la police craignait également, au vu du nombre conséquent de policiers antiémeute stationnés aux alentours du rassemblement, qui exerçaient une surveillance étroite. L’après-midi s’est déroulé sans incident.

Discours bipolaire

De son côté, Alain Soral, privé de salle, a choisi le monde virtuel pour s’adresser à ses adeptes. C’est en direct sur Facebook, et malgré tout depuis Genève, qu’il a tenu sa conférence. Dans une tirade interminable, le Cheikh Imran Hosein a tenté d’expliquer que le monde allait entrer dans «la troisième étape de l’ombre qui s’abat sur le monde», soi-disant prédite par le Coran. En résumé, l’homme s’attend à ce qu’une alliance judéo-chrétienne dirigée par Israël opprime l’humanité encore plus fortement que le précédent «complot américain».

Alain Soral a quant à lui pesté contre «un système qui a mis en mouvement les petites associations d’extrême gauche pour l’empêcher de s’exprimer». Dans son discours, il a appelé à une alliance mondiale contre l’oppression, tout en divisant le monde en deux camps, «les bons et les mauvais».

Le tout a eu lieu dans un contexte tendu en matière d’extrémisme politique en Suisse. Depuis le rassemblement néonazi d’Unterwasser (SG), mi-octobre, ce type de manifestation s’est multiplié de manière significative.