Deux ambitions romandes pour une chaise percée

Le Journal du Jura: Conseil fédéral· Un Romand pourrait figurer sur le ticket UDC qui sera soumis à l’assemblée fédérale. Portraits croisés du Vaudois Guy Parmelin et du Valaisan Oskar Freysinger

Berne

L’UDC la joue beau prince depuis qu’Eveline Widmer-Schlumpf a renoncé à briguer un nouveau mandat au Conseil fédéral le 9 décembre. «Je pense qu’on s’achemine vers un ticket à deux noms», a déclaré le président de l’UDC, Toni Brunner. Cette formule pourrait permettre à un candidat romand de se profiler, conformément aux exigences posées par les présidents du PS et du PDC. Ils sont deux à vouloir tenter l’aventure: le conseiller national vaudois Guy Parmelin et le conseiller d’Etat valaisan Oskar Freysinger.

Leur style diffère: jovial pour l’un, provocateur pour l’autre. Mais tous deux souffrent d’un handicap commun: il y a déjà deux Romands au Conseil fédéral. Cela réduit considérablement leurs chances. Pourtant, on ne peut pas exclure une stratégie UDC qui consisterait à proposer une candidature romande alibi pour mieux faire élire le «vrai» candidat alémanique. Si tel devait être le cas, c’est le moins éligible des deux, à savoir l’imprévisible Oskar Freysinger (55 ans), qui devrait figurer sur le ticket. Car le rassurant Guy Parmelin (57 ans) aurait toutes ses chances s’il était nommé en compagnie d’un «dur» de l’UDC. Portrait croisé en quatre chapitres.

L’expérience

Guy Parmelin

Le paysan-vigneron de Bursins siège depuis 2003 au Conseil national. Il a été réélu sans problème le 18 octobre. Sa palette politique est large. Il a fait sa place dans deux commissions importantes: la commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie, ainsi que la commission de la sécurité sociale et de la santé publique. Il a d’ailleurs présidé celle-ci au cours des deux dernières années. Sans être bilingue, il est à l’aise en allemand.

Oskar Freysinger

L’ancien professeur d’allemand a siégé au Conseil national de 2003 à 2015. Il a hérité de deux commissions d’importance secondaire pour l’UDC: la commission de la science, de l’éducation et de la culture, ainsi que la commission des affaires juridiques. Depuis son entrée au gouvernement valaisan, en mai 2013, il s’est complètement désengagé du travail en commission. Par contre, son expérience dans un exécutif, même brève, lui donne du poids. Autre atout: il est parfaitement bilingue.

L’ancrage dans le parti

Guy Parmelin

Guy Parmelin est issu de l’aile agrarienne. Il a présidé l’UDC du canton de Vaud de 2000 à 2004. Sa voix y est toujours respectée, mais pas au point de faire la pluie et le beau temps. Cet été, il a réclamé en vain le départ immédiat de la présidente Fabienne Despot après l’affaire de l’enregistrement secret de membres de la direction du parti. Certains lui en veulent encore de n’avoir pas brigué le siège de conseiller d’Etat laissé vacant par l’UDC Jean-Claude Mermoud, car c’est la gauche qui en a profité. A Berne, il est vice-président du groupe parlementaire, mais il n’est pas membre des instances dirigeantes de l’UDC suisse.

Oskar Freysinger

Oskar Freysinger fait partie de ces UDC qui se sont engagés dans un parti déjà blochérisé. Il a fondé la section valaisanne en 1999 et l’a présidée à deux reprises. Le renforcement de la députation UDC du Valais repose en partie sur son activisme. L’UDC suisse lui a donné une reconnaissance publique en le nommant vice-président du parti. Il a continué à occuper cette fonction après son entrée au Conseil d’Etat.

Le style politique

Guy Parmelin

Bien qu’il défende fidèlement les positions de l’UDC suisse, il a cette rondeur vaudoise qui facilite les rapports sociaux. C’est d’ailleurs un homme qui préfère le dialogue à la confrontation et qui est ouvert au compromis. Il l’avait montré lors des débats sur la onzième révision de l’AVS, sans pour autant réussir à convaincre son parti. Sa présidence de la commission de la sécurité sociale est saluée. Le Vaudois connaît ses dossiers et sait se placer au-dessus de la mêlée quand il le faut.

Oskar Freysinger

En tant que conseiller national, il l’a toujours joué perso. Il n’a pas hésité à prendre le contre-pied de son parti en s’engageant par exemple pour la réglementation du prix du livre. Son style est axé sur la confrontation. En tant que chef du Département de la formation et de la sécurité, ses relations avec le corps enseignant ont été d’emblée conflictuelles. Il a cependant respecté le principe de collégialité. Il affirme n’avoir jamais remis publiquement en question une décision du gouvernement valaisan depuis qu’il y siège.

Le regard extérieur

Guy Parmelin

Guy Parmelin est l’UDC avec qui les membres des autres partis vont volontiers boire un verre. S’il figure sur le ticket UDC, il aura cependant des comptes à rendre devant les groupes parlementaires qui l’auditionneront. Comme Oskar Freysinger, il est membre du comité d’initiative contre l’immigration de masse. Il devra donc expliquer comment il concilie cet engagement avec la défense des bilatérales.

Oskar Freysinger

Même au sein de son parti, il a la réputation d’être imprévisible. A l’extérieur de l’UDC, il suscite une méfiance décuplée. Champion de la lutte contre l’islamisation, il est l’un des artisans du succès de l’initiative contre la construction des minarets. Il poursuit sur la même voie en siégeant dans le comité d’initiative pour l’interdiction de la burqa. Sa participation à titre d’orateur à certains rassemblements de l’extrême droite européenne est rédhibitoire pour la gauche. Il en va de même du drapeau du IIe Reich ornant sa cave, car c’est un symbole récupéré par les néonazis.